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L’Etat de droit est-il une priorité dans le budget ?

Dans la nouvelle loi fiscale 2012-2013 proposée par le gouvernement Martelly / Lamothe, le renforcement des institutions occupe une place importante. À la chambre des députés, la Ministre des Finances, dans son discours, accorde une attention particulière à la décentralisation et à l’amélioration des services publics. Mais le budget alloué au secteur judiciaire ne semble pas satisfaire les tenants de ce pouvoir.

Parmi les cinq ministères qui possèdent à eux seuls la moitié du budget de fonctionnement de l’Exécutif, le Ministère de la Justice et de la Sécurité publique obtient la meilleure enveloppe, soit une somme de : 6,5 milliards de gourdes. Il est sur ce point égalé uniquement par le ministère de l’Education Nationale et de la Formation Professionnelle . Viennent ensuite les ministères de l’Economie (3.2 milliards de gourdes), de la Santé publique (2.4 milliards de gourdes) et de l’Intérieur (1.1 milliards de gourdes). On notera que l’administration et la gestion du Pouvoir Judiciaire ne relève plus du ministère de la Justice avec l’installation du CSPJ. Ce dernier jouit aujourd’hui de son propre budget.

La présentation du budget au Parlement a précédé l’installation du CSPJ. 50 millions de gourdes sont allouées à cette nouvelle institution qui aura à sa charge l’administration centrale du pouvoir judiciaire. La mise en place de cet organe garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire nécessite pourtant des fonds supplémentaires pour son entrée en fonction.

Le Conseil a certes pu trouver un siège après des mois de tâtonnements, mais l’ameublement de l’espace, l’achat des matériels, le recrutement et le traitement du personnel exigent du CSPJ un confort particulier sur le plan budgétaire. Des voix s’élèvent déjà pour critiquer le maigre montant qui a été envisagé pour le fonctionnement de cette institution au cours de l’exercice 2012-2013.

Un total de 778,6 millions de gourdes est prévu comme crédit de fonctionnement pour le pouvoir judiciaire au cours du nouvel exercice. S’il est vrai que l’élaboration des lois et le bon fonctionnement du Parlement font partie des critères de l’établissement de l’État de droit, il est important de souligner que le Parlement recevra 4% du total du crédit de fonctionnement prévu dans le budget contre 1.49% pour le pouvoir judiciaire.

Le Gouvernement a réservé une enveloppe spéciale pour des chantiers d’envergure dans le domaine de la justice. 614,5 millions de gourdes doivent servir à la construction des services publics de base de la justice dans plusieurs villes d’Haïti : un tribunal, un bureau d’état civil et un sous-commissariat. Le ministère de la Justice et de la Sécurité Publique dans son plan d’action 2012-2013 prévoit de construire une cinquantaine de tribunaux dans divers coins de la République. Les Cours d’Appel des Gonaïves, des Cayes et de Hinche devront aussi être rénovés, selon la ministre de l’Economie et des Finances devant la chambre des députés.

Ces projets qui feront désormais intervenir le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire sont pour la plupart en cours d’exécution de concert avec des partenaires internationaux du secteur de la justice. Grâce à la coopération canadienne, à travers son projet dénommé « Start », le secteur judiciaire s’apprête à inaugurer la prison civile de la Croix –des-Bouquets.

Le budget prévoit une aide internationale évaluée à 45.4 milliards de gourdes pour l’année 2012-2013. Mais on sait que le renforcement de l’Etat de droit fait partie des domaines d’intervention privilégiés des acteurs externes. En dehors des soutiens externes, le budget réserve 286 millions de gourdes au renforcement de la PNH et 124,5 millions de gourdes pour la réhabilitation et la construction de commissariats.

Ces travaux incluent la construction du grand quartier général de la PNH, de l’Inspection générale de la police, de la base marine des Cayes, d’une nouvelle prison civile et la réhabilitation de plusieurs commissariats affectés par le séisme du 12 janvier 2010. Le gouvernement envisage aussi d’augmenter l’effectif de la PNH et les recrutements pour les secteurs de la sécurité, de la santé et de l’éducation totalisent à eux seuls deux tiers des dépenses totales de personnel de l’exécutif.

L’année 2012-2013 sera l’année des grandes décisions en matière d’État de droit et de démocratie. Elle doit voir entre autres : la création du premier Conseil électoral permanent, l’organisation des élections, la dynamisation du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire et l’entrée en fonction du premier Conseil constitutionnel. Nouveau personnel, nouvelles ressources matérielles, le budget 2012-2013 doit satisfaire des besoins divers, s’il faut vraiment considérer l’État de droit comme une priorité.

Eddy Laguerre
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Source: Le Matin