Culture & Société
Jimmy Jean-Louis dans la peau de Toussaint Louverture
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- Catégorie : culture & societe
- Publié le dimanche 25 novembre 2012 16:25
Fier dans son beau costume, Jimmy Jean-Louis, « The Haitian », manie le sabre et chevauche à toute allure pour incarner Toussaint Louverture. Par-delà son jeu, l'acteur est conscient de l'importance de cette tranche d'histoire. Il partage avec les lecteurs son expérience à travers le plus prestigieux rôle de sa carrière.
Le Nouvelliste (LN) : Incarner Toussaint Louverture, héros de l'indépendance d'Haïti, que représente ce rôle pour vous ?
Jimmy Jean-Louis (JJL) : Je suis très honoré parce que je crois que Toussaint Louverture est le personnage le plus important de l'histoire d'Haïti. Important non seulement pour les Haïtiens, mais aussi pour le peuple noir. Car il est celui qui a donné l'indépendance à la première république noire, et surtout celui qui a lutté pour l'égalité des peuples et non pas uniquement pour la fin de l'esclavage. C'est un grand honneur pour moi.
LN : A-t-il été facile pour vous de vous mettre dans la peau de ce grand homme ?
JJ L : Pas du tout ! Cela n'a pas été facile et a nécessité beaucoup de travail. Déjà un travail de recherche sur le personnage, beaucoup de lecture et beaucoup de documentaires ; beaucoup de travail physique notamment. Ce rôle a exigé une préparation spéciale. Après, il fallait être très méticuleux pour jouer chaque étape de la vie de Toussaint, parce qu'au final cela a été comme jouer quatre personnages. Et en plus de cela, il y a des messages très précis que je voulais faire passer, comme sa dignité; dans les pires moments, il a toujours su garder la tête haute. Je voulais aussi conserver ce mystère qui l'a toujours entouré. C'est un personnage complet, très difficile à jouer, mais d'un autre côté, Toussaint Louverture est d'un caractère très intéressant.
LN : Que vous a apporté cette expérience ?
JJL : Cette expérience continue à m'apporter beaucoup. Cela me met dans une position dans laquelle je dois accepter certaines responsabilités, comme c'est le cas quand on vous passe un flambeau. Je suis conscient d'être le nouveau visage de Toussaint Louverture. En plus, je sais aujourd'hui monter à cheval et manier le sabre (rires).
LN : Le film a été tourné en Martinique et non pas en Haïti. Cela vous fait quoi ?
JJL : Cela me chagrine, bien sûr. Etant la première république indépendante, Haïti aurait dû évidemment accueillir une production qui honore ses héros. Et cela aurait été d'un grand apport économique pour le pays. C'est bien malheureux. Il nous faut travailler à restaurer les infrastructures, parce qu'il y a un gros travail à faire sur notre image pour pouvoir attirer les investisseurs et les touristes.
LN : Vous avez dit plus tôt que vous avez appris à monter à cheval... Pouvez-vous nous donner quelques petites anecdotes de tournage ? Combien de fois êtes-vous tombé, par exemple ?
JJL : (Rires). J'ai appris à monter pendant deux mois avant le film, j'ai été donc un fin cavalier lors du tournage. Je ne suis pas tombé, bien que certaines scènes étaient difficiles à gérer, comme les scènes où il fallait passer à travers les explosions au grand galop et combattre. J'ai perdu ma perruque au cours d'une scène. Ce fut un éclat de rire général sur le tournage. Mon cheval était un peu agité, il s'est cabré pendant que j'essayais d'éliminer un soldat français, et vlan, ma perruque est partie !
LN : Vous avez eu à porter des costumes assez lourds, je suppose, mais aussi très serrés. Comment ça s'est passé ?
JJL : Cela n'a pas été facile. On tournait pendant l'été, sous les tropiques, dans des costumes lourds et chauds et les pantalons étaient moulants. Je n'avais pas de difficultés à porter le pantalon serré car j'étais danseur dans le passé, mais pour les autres acteurs, cela a été très dur. Cependant, c'est aussi ça le travail d'acteur, de s'adapter à toute situation.
LN : Parlez-nous du parcours et de la distribution du film depuis sa sortie.
JJL : L'absence de salles de cinéma à Port-au-Prince a entravé la projection du film. Nous n'avons pu le faire qu'avec un effectif très réduit. Conscients de ce problème, nous avons fait des démarches pour offrir le film à toutes les télévisions haïtiennes, mais les responsables ne nous ont pas contactés en retour. Mais j'ai appris que quelques télévisions ont pu diffuser « Toussaint Louverture ». Cependant au niveau de la production, nous aimerions que le film soit disponible pour tous les Haïtiens. Une projection générale chaque 1er janvier ou pour la commémoration de la Bataille de Vertières serait idéale.
D'un autre côté, il y a eu une bonne sortie en France à la télévision, plus de sept millions de téléspectateurs. On a obtenu le « Prix de l'audience », celui du « Meilleur film », et j'ai obtenu le prix du « Meilleur acteur » au Festival du film panafricain à Los Angeles ; Vue d'Afrique nous a décerné le prix du public. Il y a un mois, nous avons gagné le prix du « Meilleur film » et du « Meilleur acteur » à Trinité-et-Tobago. L'AMA (African Movies Awards) nous a primé « Meilleur film »... Le film continue à faire son chemin et jouit d'une reconnaissance sur tous les continents, excepté l'Asie où on ne l'a pas encore diffusé.
LN : En parlant de la France, comment le public français a-t-il accueilli Toussaint Louverture?
JJL : Cette tranche d'histoire inclut le tout-puissant Bonaparte ! Les Français, pour la majorité, ont vraiment été surpris de découvrir cette période et surtout cette facette de leur propre histoire. Cependant l'accueil a été positif.
LN : Sur quoi travaillez-vous pour le moment ?
JJL : Je travaille sur quelques projets personnels dont des documentaires. J'irai en Haïti pour filmer le teaser d'un long-métrage que l'on va produire en Haïti l'année prochaine. Je travaille actuellement sur un film avec Jerry Lamothe que l'on compte tourner en décembre et j'ai d'autres films à sortir comme celui avec Gérard Depardieu, qui sera sur les écrans au courant de 2013. Pour les productions américaines, je partage l'écran avec Vivica Fox dans « Doctor Bello », pour ne parler que de cela.
LN : Vous serez en Haïti cette semaine, votre femme et vos enfants ont-ils déjà visité Haïti ?
JJL : Ma famille connaît très bien Haïti. Ma femme et mes enfants ont visité le pays à plusieurs reprises.
LN : Quelle est la prochaine étape du film « Toussaint Louverture » ?
JJL : Le film mérite d'être projeté dans toutes les universités, dans toutes les écoles aussi bien en Haïti que dans la diaspora. Avec l'ambassadeur d'Haïti à Washington, M. Paul Altidor, nous travaillons à réaliser ce projet, parce que ce film projette une bonne image d'Haïti. Nous attendons le support de tous les médias. Je continue à travailler pour une meilleure Haïti, tant à travers mon travail d'acteur qu'avec ma fondation « Hollywood unites for Haiti ». Nous avons une école gratuite et nous offrons un plat chaud chaque jour aux enfants. Je profite de cette occasion pour remercier mes fans de leur incroyable support !
Stéphanie André
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Washington DC, le 18 novembre 2012