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L'homme de L'ONA « Desgraff devrait être en prison », dixit JJJ
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« Desgraff devrait être en prison », dixit JJJ
L'agression physique perpétrée contre Bernard Desgraff le 29 avril dernier par une trentaine de présumés ex-employés de l'Office National d'Assurance-Vieillesse (ONA) fait encore des vagues. La Primature condamne l'acte mais esquive les accusations portées contre le directeur général de l'institution. Le sénateur John Joël Joseph, par contre, réclame son « arrestation pour corruption ».
Cette séance de convocation du directeur général de l'Office National d'Assurance Vieillesse (ONA) marquera l'histoire du parlement haïtien. Bernard Degraff y a été doublement humilié, lundi dernier au bicentenaire. Giflé et molesté par des ex-employés de l'institution, lâché par son Ministre des Affaires sociales Charles Jean Jacques qui l'accompagné à l'hémicycle, l'homme qui annonçait être disposé à affronter le parlement a perdu sa grande gueule.
Desgraff a avoué avoir violé la loi et commis des irrégularités dans sa gestion des fonds de pension des employés des secteurs public et privé en présence de la commission Affaires sociales du Sénat de la République. En absence de Jean Robert Simonise, son bras droit, lors de cette convocation, Bernard Desgraff a pris l'eau tout seul, sous le regard stupéfait d'un Ministre qui semblait tout ignorer du fonctionnement opaque et douteux de cette institution placée sous sa tutelle. Il s'était fait accompagner par son consultant, « détenteur de trois maitrises et d'un doctorat », dont les émoluments s'élèverait à près d'un million de gourdes.
La méthode Desgraff
La gestion de Bernard Desgraff à la tête de l'ONA est poreuse. Son salaire est le plus élevé de la République : 470 mille gourdes par mois presque le double du salaire du chef de l'Etat. Son chef de cabinet Jean Robert Simonise, qu'il appelle publiquement « Simo », se régale avec 300 mille gourdes en poche mensuellement. Le directeur du conseil juridique qui est aussi président d'une firme de consultation pour l'ONA reçoit la rondelette somme de 940 mille gourdes. C'est Desgraff lui-même qui, imperturbable, égrène ces chiffres faramineux en face des pairs conscrits.
Haussant les épaules comme pour se dédouaner, le directeur général de l'ONA trouve normal « d'ajuster son salaire et celui de ses fonctionnaires proportionnellement à leur diplôme international ». Embarrassé durant toute la séance d'audition, Bernard Desgraff admet finalement avoir pris des décisions dépassant ses compétences en plaçant l'argent de l'institution dans une banque privée. « J'étais à la recherche d'avantages pour l'ONA », chuchote presque le directeur tout en essayant d'écarter le microphone mis à sa disposition. « C'est en dehors de la loi », corrige le président de la commission, le sénateur Maxime Roumer. « J'admets, honorable », répond-il en baissant le ton.
Pour faire fonctionner son administration, Bernard Desgraff innove encore plus. Il achète des véhicules pour des particuliers avec les fonds de l'ONA. L'ensemble de ces dépenses se chiffre à plus deux de millions de dollars. Plus d'un million supplémentaire aurait été décaissé pour blinder ces véhicules. Toutes ces transactions effectuées en République dominicaine se seraient réalisées sans passation de marché. Lors des échanges, un parlementaire a accusé Mr Desgraff d'avoir octroyé à son chef de cabinet une enveloppe de 750 mille gourdes pour achat de médicaments lorsque celui était hospitalisé.
Accusé de « tonton macoute » par le sénateur John Joël Joseph, le directeur général de l'ONA aurait également procédé à une vague de révocations. Plusieurs centaines de gens ont été renvoyés pour des motifs divers après une fameuse évaluation orchestrée par Desgraff lui-même et son équipe. Derrière cette démarche, estime le sénateur John Joël Joseph, se cacherait une manœuvre pour licencier des militants politiques de l'opposition. « La loi condamne le procédé utilisé », selon le parlementaire qui a réclamé l'arrestation immédiate du directeur général.
Le dossier de l'ONAPAM a aussi été abordé au cours de cette récente audition au sénat. Au delà des prêts jugés injustifiés pour les démystificateurs du jour, l'acquisition d'un immeuble à Pétion-Ville pour la somme de deux millions de dollars, sans appels d'offre, a été jugée scandaleuse par des membres de la commission Affaires sociales du Sénat de la République. « On a dû par ailleurs dépenser 500 mille dollars pour réparer cet immeuble », a tenté de se justifier un Bernard Desgraff sur la défensive et se perdant dans un long discours sur son Ipod. Constatant l'incapacité de ce dernier à justifier ses nombreuses dépenses effectuées sans l'aval de son supérieur hiérarchique, le sénateur Pierre Franky Exius a appelé à sa révocation pure et simple pour corruption.
L'affront
Suant à grosses gouttes dans une salle hyper climatisée, le directeur général de l'Office National d'Assurance-Vieillesse a vécu un moment encore plus terrible. A sa sortie, une vingtaine de présumés ex-employés de l'institution l'ont frappé à plusieurs fois au visage et à la tête. Les agents de sécurité du Sénat ont été dépassés par les événements qui ont pris l'allure d'une manifestation improvisée sur le parking du parlement. Le président du Sénat, Dieuseul Simon Desras a condamné vivement cet « acte de barbarie caractérisée perpétré par des délinquants ».
Lamothe, lutte contre la corruption : « aloral »
La Primature condamne aussi cette agression. Elle appelle le Sénat à prendre des mesures pour assurer la sécurité des membres du pouvoir exécutif qui doivent fréquenter l'institution. Pourtant, le premier ministre qui dit lutter ardemment contre la corruption n'a pipé mot sur la séance d'audition du #1 de l'ONA. L'équipe de Laurent Lamothe fait la sourde oreille, évitant de se prononcer sur les nombreux aveux de Bernard Desgraff dont l'arrestation est réclamée pour corruption avérée. Le régime rose, estiment des analystes politiques, peut donc commencer sa lutte contre la corruption à l'intérieur même de l'ONA s'il ne veut plus être à « l'oral ».
Eddy-Jackson Alexis
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Le Matin
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