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Fonds Petrocaribe: Personne n’est responsable !
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Le fonds PetroCaribe est vidé. Comme par enchantement. En un temps record. Ses gestionnaires ne sont pas responsables. Pourtant, les enquêtes menées par la commission parlementaire montrent déjà qu'il y a eu malversations et autres actes de corruption graves. L'État serait habité par une mafia puissante. C'est la conclusion de Youri Latortue. Des firmes de construction internationales ont pratiquement tout ramassé. Elles ont travaillé sans supervision et dans l'ombre des collabos, en dehors de toute norme.
Mauvaises gouvernances, corruption, voici les grands maux d'Haïti, résumés à travers la gestion des fonds PetroCaribe. Des firmes et pseudo firmes ont été engagées, ne serait-ce qu'en se référant aux dernières déclarations de Clément Bélizaire au Parlement. Elles ont ramassé « 1 milliard, sur le milliard 600 millions engagé dans les 380 projets financés avec les fonds PetroCaribe ». Une preuve de plus que la lutte contre la corruption n'a jamais figuré parmi les priorités des gens d'ici. Et des institutions comme l'ULCC et l'UCREF ne sont qu'une addition inutile de bureaucrates qui viennent occulter ces malversations, offrant une quiétude bien indécente aux malfaiteurs de tout bord.
Pourtant, ils auraient pu indéfiniment bénéficier de la gratitude du peuple haïtien. Pour seulement un rapport. Voire même une enquête inaboutie. Mais, rien n'a été fait. Aujourd'hui la nation éprouve bien de difficultés à comprendre. Son mal empire. Et personne n'est responsable, alors que des millions et des centaines de millions de dollars issus d'une coopération salvatrice avec le Venezuela ont disparu. Le crime est d'autant plus hideux, que les Vénézuéliens eux-mêmes font face à une crise économique aiguë et devront bientôt revoir, bon gré mal gré, l'accord PetroCaribe, et par la même occasion réclamer les dettes cumulées jusque là par Haïti.
Marchés de gré à gré, attributions de prestation à des personnes qui n'ont pas le profil de l'emploi, paiement de factures en l'absence de toute prestation et fabrication de documents relatifs à des marchés publics, contrats viciés, voilà les mécanismes clés pour faire disparaitre près de 2 milliards de dollars en moins de 10 ans. Validés par la Cour des comptes et signés par les ministères sectoriels, les contrats ne sont toujours pas disponibles pour la commission. Mais, quels prix ont payés ces firmes pour bénéficier de cette impunité quasi totale ? La réponse viendra sûrement. Ces actes de corruptions semblent pourtant ne plus indigner quiconque dans ce pays, outre les politiques et autres activistes en quête de vengeance. Le vol devient presque une vertu. Bizarre !
À travers cette mainmise sur les ressources de l'État, une vérité a pu cependant éclore. « L'argent du PetroCaribe a effectivement disparu ». Elle a été dévoilée par ceux-là mêmes chargés de la gestion des fonds. C'était trop évident. En effet, personne n'a pu nier cette réalité des faits. Sauf qu'aucun ne revendique la responsabilité de cette fuite incontrôlée des fonds. Jacques Rousseau, titulaire du MTPTC, en mode Ponce Pilate, se lave les mains. En guise de défense, il livre un lot de dossier aux commissaires, tout en prenant la précaution de charger l'Unité de construction de logement et des bâtiments publics (UCLBP) et le ministère de la Planification et de la Coopération externe (MPCE) qui ont fait de l'ombre à son ministère.
Laurent Lamothe quant à lui, informe n'avoir engagé personnellement aucune dépense dans le cadre de PetroCaribe. Toutefois, les manipulateurs des fonds du programme vénézuélien, durant son règne, sont des ministres de son gouvernement qu'il recommande à la commission d'auditionner dans le cadre de l'enquête. En 31 mois passés à la Primature, il a pourtant signé 5 résolutions de contrats évalués à 668 millions de dollars pour un total de 185 projets. Selon les témoignages, le BMPAD ordonne les décaissements de fonds. Pourtant, Michael Lecorps et Eustache St Lot qui se sont succédé à la tête de l'institution ont affirmé qu'ils n'ont rien à se reprocher.
Encore pire, avec le témoignage de Clément Bélizaire devant la Commission économie et finances de la Chambre basse. S'il est vrai que sa convocation ne visait pas la gestion de PetroCaribe, elle est indicative des malversations récurrentes qui entachent les actions des institutions étatiques. La firme en charge de la construction du bâtiment devant loger le Parlement, avait-il confié, avait donné deux fausses adresses. À date, elle est portée disparue. Mais qui est responsable. Sûrement pas l'UCLBP, avait déclaré sereinement, Clément Bélizaire qui avait aussi fait remarquer que son institution ne gère pas de fonds.
La justice, ou du moins ce qu'il en reste devra établir la responsabilité des uns et des autres dans cette vague de corruption étatisée. Une tâche ardue, car l'enquête parlementaire n'est pas encore terminée et les instrumentalisations politiques qui peuvent être faites de ce dossier, notamment en cette période électorale, constituent un mélange dangereux pouvant menacer son aboutissement. De toute façon, quoi qu'on dise, les fonds n'ont pas servi à la réalisation des travaux auxquels ils étaient destinés. Et il y a forcément un responsable, des responsables mêmes. Et tout aussi sûrement ce ne sera pas le peuple haïtien qui croupit dans la misère et qui subit les exactions de ses élites.
Lionel Édouard
Source: Le National
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