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Analyses & Opinions

Robert Lodimus: Le sens d’une « Révolution » pour les « pauvres »

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 Â« Quel plus terrible fléau que l’injustice qui a les armes à la main !? Â»                                                                                                                  (Aristote)

La République d’Haïti – comme beaucoup de pays qui s’écroulent sous le poids du désastre politique et du fardeau financier – se laisse détruire graduellement par les comploteurs locaux, ces femmes et ses hommes captieux, valets d’écurie des gardiens de Hadès. Allions-nous jusqu’à prétendre que son « Ã©lite intellectuelle Â», produit d’un « savoir Â» jusqu’à présent inopérant, vantarde et orgueilleuse comme Narcisse, serait actuellement dépassée par les nouvelles méthodes et théories à partir desquelles se posent les équations complexes des enjeux politiques et économiques sur le tableau gluant de la mondialisation labyrinthique et subjuguante ? Cependant, nous nous octroyons la liberté d’indiquer que  le temps est venu pour Haïti d’envisager au moins les moyens – nous ne disons même pas prendre – de se défendre honorablement contre le maléfice politique pratiqué par les États puissants, si elle veut toutefois éviter le risque de disparaître comme certaines villes anciennes, dont Sodome et Gomorrhe, Pompéi… Ou certaines civilisations, telles que celles des Mycéniens en Grèce continentale, des Mayas du Mexique en Amérique... Elles sont disparues, ces cités et civilisations, pour de multiples raisons. Entre autres : Changements environnementaux, guerres, catastrophes naturelles, viroses ou maladies virales… Aujourd’hui, fait étonnant, paradoxal, des virus révélés dangereux pour la santé humaine sont reconstitués, créés même dans les laboratoires des grands instituts de recherche médicale qui utilisent des technologies sophistiquées. Car les guerres se font secrètement et se gagnent aussi avec des armes bactériologiques. Peut-être que les germes du choléra distribués en Haïti par la MINUSTAH, faisant tous les jours un nombre considérable, incalculable de « victimes muettes Â» dans les villes et les campagnes, les ravages opérés par le chikungunya ont, comme le cÅ“ur, leurs raisons que la raison ne connaît point…!

La République d’Haïti naquit, il y a un peu plus de deux cents ans, par ce que nous appellerions « nécessité de survivance historique Â». Après avoir vaincu les esclavagistes européens, les Africains n’avaient pas les moyens de retourner sur leur continent d’origine. Pour survivre à partir de 1804, il avait fallu qu’ils eussent fondé une nation implantée dans une nouvelle patrie et qui eût réussi à codifier le fonctionnement d’un type d’État souverain et indépendant reconnu sur le plan mondial. Ce que firent – de peine et de misère – les héros indigènes qui avaient combattu à Vertières. Voici comment le dictionnaire de politique définit une nation :

« â€¦Une communauté humaine ayant conscience d’être unie par une identité historique, culturelle, linguistique ou religieuse. En tant qu’entité politique, la nation, qui est un concept né de la construction des grands États européens, est une communauté caractérisée par un territoire propre, organisé en État. Elle est la personne juridique constituée des personnes régies par une même constitution… Â» 

Après trois siècles de servitude coloniale, les premiers habitants de l’île, les Indiens, ayant été décimés par les colons espagnols, les déportés de l’Afrique devinrent en toute logique les héritiers naturels des terres sur lesquelles ils avaient été exploités, maltraités, assassinés, humiliés, martyrisés… Les colons ne le perçurent pas de cette façon. Leurs descendants également. À leurs yeux, dans leur conception de colonisateurs directs ou par filiation, cet acte d’appropriation territoriale est scellé d’illégitimité et d’illégalité. Car Saint-Domingue, rebaptisé Ayiti, devrait, comme Martinique, Guyane, Guadeloupe, figurer sur la liste des territoires français d’outre-mer. Cette camarilla occidentale, de 1804 à nos jours, n’a jamais arrêté d’inventer les complots, de multiplier les menaces, de participer à la création des cellules intra et extra-environnementales de déstabilisation politique et sociale pour contrefaire et anéantir les moindres élans d’Haïti vers une possibilité de développement économique et de régulation financière. L’histoire nous apprend que les États-Unis ont appuyé la France dans tous ses projets de reconquérir ce qui reste et demeure pour eux Saint-Domingue, la colonie riche et prospère qui a enrichi les « royaumes des brigands Â» dirigés par des « Princes débauchés Â», des « Attila Â» sans âme et sans conscience, des « fléaux de Dieu Â» qui copulent honteusement avec le Diable. Sacrifient la « jeunesse Â» naïve et innocente sur les champs de bataille – comme on le voit encore aujourd’hui en Irak, Syrie, Pakistan et ailleurs – pour la gloire et le triomphe de l’impérialisme de droite ou de gauche, et de la théocratie apocalyptique.

Avec le temps et la sagesse conférée par la maïeutique, nous sommes parvenus à comprendre que les pays du G7 – les va-t-en-guerre farouches, qui ont mal lu Nostradamus, même la Bible et le Coran – nourrissent le dessein diabolique qui devra tôt ou tard provoquer le phénomène de « désétatisation Â» de la République d’Haïti. Et ce qu’il faut souligner, le processus a démarré longtemps déjà. Avec la collaboration traîtresse des bourgeois compradores, des politiciens autochtones véreux, pseudo-élus, et qui se comportent comme des agents aveugles de la CIA, DGSE, GRC, MI5 ou MI6, et enfin avec la connivence de tous les « apatriotes Â» irréductibles qui vivent et s’enrichissent déloyalement aux dépens des couches miséreuses désarmées, noyées dans l’analphabétisme. Les dirigeants des « organisations haïtiennes des droits humains Â» bidon implantées dans le pays ou dans la diaspora, à la solde de la communauté internationale dévoyée, font aussi partie du lot des « vichystes Â» de Philippe Pétain qui trahissent leur patrie et souillent leur honneur. D’ailleurs, certains d’entre eux, installés aux États-Unis et au Canada, ne font que rédiger des communiqués laconiques, superficiels, sans conviction, dans un langage bancal, pauvre, argotique... Leur vrai rôle consiste à saboter les circuits qui pourraient déclencher le processus d’une « Révolution Â» sociétale au niveau national ou mondial.

Les puissances dominantes ont juré sur la tête de leurs peuples de reprendre ou de détruire les pays comme Haïti, Cuba, Algérie et tous les autres qui ont bravement résisté, lutté et triomphé de l’oppression coloniale ou néolibérale. Elles ne se sont jamais remises de leur déroute…                                                                                                       

Il ne faut pas oublier comment les sionistes – avec l’appui de l’ONU – ont procédé fallacieusement pour donner naissance à l’ Â« Ã‰tat israélien Â» sur les terres de la Palestine. Venus de partout, après la Shoah(1), guidés par la conclusion du manifeste de Léon Pinsker(2), ils se sont mis à acquérir individuellement des vastes portions de terres, à des fins soi-disant agricoles. Ils les ont rassemblées. Unifiées. Transformées en villages. Élevées En villes. Puis constituées en pays. 

Actuellement, il y a beaucoup d’étrangers qui achètent des terrains en Haïti. Les paysans ont faim. Ils liquident leurs biens immobiliers, sous l’emprise complice et l’incitation frauduleuse et anticonstitutionnelle de l’État bourgeois, sans réfléchir… Les « spoliateurs classiques Â», travestis en « hommes d’affaires progressistes», « coordonnateurs d’organismes de bienfaisance Â», « guides spirituels de congrégations religieuses Â» ou « paisibles retraités Â», utilisent le même stratagème en République dominicaine. À Cuba, cela a pris une « Révolution Â» anticapitaliste pour chasser les « envahisseurs étasuniens Â» et récupérer les 80% des terres agricoles que ces derniers occupaient, et sur lesquelles suaient sang et eau 1 million 400 mille travailleurs, tous des campesinos très mal rémunérés. Et encore, disons-le, grâce aux mesures politiques adoptées par l’État socialiste en matière de « nationalisation Â» ou « déprivatisation Â» de la propriété. 

Les « amis hypocrites Â» d’Haïti – contrairement à ceux de la Société des amis des Noirs de Brissot, Abbé Grégoire, Mirabeau, Clavière, fondés en1788 pour défendre les droits imprescriptibles des esclaves – finiront-ils un jour de la détruire avec les bigarrures d’un « misérabilisme Â» qu’ils imputeraient, pour s’en laver les mains comme Ponce Pilate, à la fatalité divine ou l’eschatologie ? Rappelons en passant que les notions de « misérabilisme Â» et de « populisme(3) Â» – dans un tout autre registre – sont scientifiquement traitées par les sociologues Passeron, Grignon, Chambers, Sardan… Honnêtement, il faut reconnaître que le processus de dépérissement de la République d’Haïti paraisse irréversible. C’est « l’abomination de la désolation Â», comme diraient Bossuet ou Voltaire, que l’on observe, depuis le premier jour de l’occupation d’Haïti par les Yankees, dans le périmètre des épopées historiques – quoique sacré – de ce peuple martyr.  

Tristesse et déception

Cette situation de déprime collective ne semble pas du tout interpeler la conscience de la soi-disant « Ã©lite intellectuelle » et du « troupeau Â» de « politiciens prostitués Â» qui ont transformé respectivement leur « savoir Â» et leur « pouvoir Â» en source de corruption et de badinage, alors que l’avenir ostensiblement problématique des masses devrait susciter un grand débat de société. Certains parleraient même, sans se faire blâmer, de l’existence d’un phénomène de « décrue  de l’intelligence Â» actuellement en Haïti. Écrire ne peut pas sauver les « misérables Â». Mais il nous permet au moins de dénoncer le fait ou de prendre acte qu’il existe sur la terre des individus sans visage et sans nom qui sont totalement méprisés par les « princes Â», oubliés et abandonnés par les « dieux Â». Les citoyennes et les citoyens ont donc la « responsabilité d’agir Â». Pas le « devoir  de voter Â».

« La loi ne donne pas les mêmes droits au pauvre qu’au riche. Â»    (Plaute)

Les courants de décadence formés par les eaux déchaînées de la « stérilité politique Â», les vagues houleuses du manque de « vision économique Â» finiront certainement – si rien n’est fait à ce niveau pour réorienter, viabiliser la politique interne et externe de l’État dépérissant – par engloutir ce pays de 27 750 kilomètres carrés de la Caraïbe dans un confluent tumultueux d’autodestruction ?

Jacques Ellul – nous l’avons déjà rappelé dans notre précédent texte réflexif - a écrit trois mots que nous mémorisons jalousement : Â« Exister, c’est résister ». Nous en ajoutons nous-mêmes trois autres : Â« Vivre, c’est Lutter. Â» 

Nous allons tenter – mais humblement – d’aller un peu plus loin, en essayant d’élargir le cadre de la devise ellulienne. C’est Albert Jacquard(4) – en revisitant probablement l’œuvre philosophique de Plutarque – qui nous permet vraiment de tracer les droites parallèles qui différencient « exister Â» de « vivre Â». Plutarque écrit : « Il faut vivre et non pas seulement exister. Â» Victor Hugo le rejoint en ce sens : « Ce n’est rien de mourir, c’est affreux de ne pas vivre. Â»

L’individu existe dès sa naissance. Il respire, mange, boit, rit, pleure, marche, court… Mais ce n’est pas tout. Tout le long de son passage sur la terre, il va se sacrifier, aliéner sa liberté pour se construire une « vie Â». Il est intégré et maintenu dans le cercle rigoureux des agences de socialisation. Pour être utile à sa communauté, contribuer au développement sociétal, il faut qu’il aille à l’école, apprenne un métier, fonde un foyer, éduque – dans bien des cas – des enfants qui doivent assurer la relève, afin de garantir, d’une part, la pérennisation de la patrie, et d’autre part, d’améliorer et préserver les expressions de la culture ancestrale. C’est seulement ainsi que l’être humain puisse devenir une « personne Â» et accéder ensuite au statut de « citoyen Â». En sortant de la société de nature pour fonder cette entité morale et légale qui s’appelle l’État, il a manifesté lui-même son intention de rompre avec le tribalisme primitif pour se construire un mode de civilisation qui soit capable d’humaniser les conditions de son existence terrestre. L’individu a donc sciemment désappris la vie de sauvagerie et de barbarie pour apprendre à se soumettre à la Loi. Et il l’a fait dans la dynamique du révélateur « contrat social Â» rousseauiste : renoncer à ses droits naturels – au sens où Althusser le souligne – et obéir à des normes sociales, morales et religieuses qui garantissent le bien-être individuel et collectif. L’existence de l’État est donc historique. Sa fonction essentielle consiste à réguler les tensions et les conflits interindividuels, intergroupusculaires afin de prévenir les situations qui peuvent conduire à l’explosion sociopolitique. Cependant, toutes les études axées sur les véritables caractéristiques de l’État concluent qu’il est né avec une malformation congénitale. Il n’est pas neutre. Et avec le surgissement de l’ère industrielle, le mode de fonctionnement de l’État s’aligne nettement sur les intérêts politiques et économiques de la classe dominante. Il est devenu un instrument de répression pour l’élargissement des champs « fructifiants Â» du capital. L’approche de l’analyse « gramscienne Â» de l’État nous permet de comprendre que les masses exploitées sont également blâmables de leur situation à plusieurs niveaux. Elles ont aidé – par les habitudes de vie qu’elles ont développées et adoptées dans le système capitaliste – l’ Â« idéologie bourgeoise Â» à  « hégémoniser Â» leur conscience. Elles ont donc inconsciemment consenti aux conditions dégradantes de leur domination et de leur exploitation. Dans les circonstances que nous décrivons, aucun changement social, économique et politique ne peut être « réalisé Â» sans que les élites progressistes envisagent la mise en place d’un système de rééducation viable, capable de préparer et d’adapter la mentalité de la classe ouvrière et syndicale aux impératifs de l’idéologie de la lutte pour le « désasservissement Â» des marginalisés. 

Albert Jacquard déclare : Â« Mon objectif, ce n’est pas de construire la société de demain, c’est de montrer qu’elle ne doit pas ressembler à celle d’aujourd’hui. Â»

Les tristes réalités économiques dans lesquelles végètent les peuples des ghettos du Nord et des bidonvilles du Sud poignardent la dignité humaine dans le dos. Le sang des inégalités sociales inonde le monde contemporain. Chômage, famine, analphabétisme, délinquance, variance… deviennent le lot quotidien des infortunés de la planète. La société globalisée est d’une laideur terrifiante. Il faut la démolir, repenser une nouvelle architecture et tout reconstruire. Comme le « Créateur Â» l’a fait par le « Déluge Â». Cependant, il faut pour cela provoquer l’émergence symbolique d’un « Noé(5) charismatique Â» pour préserver et nourrir les espèces qui soient capables d’incarner la « société de demain Â» dont parle le généticien français. Plusieurs penseurs humanistes le prédisent : la « propriété privée Â», l’ Â« enrichissement individuel Â» pratiqués en mode de disproportion honteuse – en comparaison bien entendu au train de vie précaire mené par les masses populaires paupérisées – détermineront la cause ultime – selon l’approche phénoménologique aristotélicienne – du cataclysme socioéconomique qui acheminera l’Humanité vers l’apocalypse. Donc, vers sa perte totale…! 

Capitalisme ou communisme : ni l’un ni l’autre 

L’État bourgeois a négocié la perdition de la planète avec le Diable… Les efforts de la classe asservie doivent être mobilisés et redirigés efficacement vers l’espoir et la volonté de le forcer à dépérir. 

Sans le vouloir, nous avons une fois de plus évoqué la pensée marxienne qui accentue sur l’importance du phénomène de dépérissement de l’État répressif dans la société révolutionnaire. Lénine suggère lui-même la fondation de l’État prolétarien pour remplacer le premier qui servait les intérêts des oligarques corrompus. Cependant, en explorant les régimes politiques de droite ou de gauche, nous nous rendons compte que ni les uns ni les autres n’ont pu répondre à la problématique aristotélicienne sur le modèle de gouvernement qu’il faudrait instaurer pour garantir le bien-être matériel et psychologique de l’individu. Aristote associe le syntagme nominal de « communauté politique Â» à la notion de « vie heureuse Â». En clair, « vivre ensemble Â» pour « bien vivre Â». Toutes les théories développées en sciences humaines pour tenter de pallier l’absence de solution aux situations de souffrances des êtres échouent, comme un bateau, dans le banc de sable de l’inappropriation et de l’inefficacité. Elles ont toutes montré leurs limites et leur irrationalité. Il ne s’agit pas d’aménager ici une plateforme quelconque d’idées et de débats pour apologiser le communisme et diaboliser le capitalisme. L’un paraît illusoire, l’autre est impitoyable. Il faut que les philosophes contemporains avant-gardistes réfléchissent sur la nécessité de découvrir d’autres concepts qui traduisent et imposent des réalités sociopolitiques et économiques plus justes.

Nous ne faisons pas du tout référence à l’ Â« Ã©galitarisme hallucinatoire Â». Rien n’est égal dans la nature. Et il ne faut pas oublier que l’ouvrage de Thomas More qui a tenté la démarche de l’égalité des êtres et des choses s’appelle L’Utopie. Le gouvernement idéal n’a jamais existé. N’existera probablement pas. Il reste tout simplement à l’individu d’en inventer un modèle qui puisse tant bien que mal rendre sa vie sur la terre plus ou moins supportable. Voilà le sens de nos réflexions! L’essence du bien-fondé de notre persistante plaidoirie…! 

Quand la politique cessera d’être la « science du pouvoir(6) Â» entre les mains d’une élite internationale, elle deviendra un instrument de bien-être pour tous les « laissés-pour-compte Â». Les masses détiennent le « pouvoir de vie et de mort Â» sur le capital. Elles peuvent le ruiner. Car c’est avec leur force de travail qu’il progresse et s’expand. Mais, malheureusement, elles ignorent elles-mêmes l’étendue de leur « puissance Â». 

Les données statistiques de la Banque mondiale révélaient en 2013 qu’il y avait plus de 3 milliards de salariés sur la planète. L’institution recensait les employés, fonctionnaires, travailleurs d’usine, ouvriers agricoles, etc. Elle n’a pas compté du nombre les 100 millions d’individus qui peinaient durant la période du recensement plus de soixante-dix heures par semaine comme domestiques dans les grands domaines des bourgeois et qui gagnaient des salaires dérisoires, sans bénéficier des avantages sociaux. On les appelle les « travailleurs de l’ombre Â» ou les « invisibles Â». L’Organisation Internationale du Travail (OIT) constate pour sa part que 83% d’entre eux sont des femmes. 40% n’ont aucun jour de congé. 

Rémi Barroux explique dans LE MONDE du 9 janvier 2013 : 

« Mais les experts reconnaissent l’imprécision des chiffres. Le nombre de ces travailleurs dans le monde dépasse sûrement la centaine de millions. Dans tous les pays, les travailleurs domestiques sont souvent des migrants, parfois des sans-papiers non déclarés. Et les enfants de moins de 15 ans, employés à des tâches ménagères, ne sont pas comptés non plus. Â» 

C’est insensé que la majorité accepte de s’appauvrir pour permettre à l’oligarchie de s’enrichir à ses dépens. Celle-ci a conçu et planifié pour le salariat un mode de vie qui procure une illusion de bonheur. Et naïvement, ce dernier a laissé le piège se refermer sur lui. Sans tempêter. Sans même s’en rendre compte. Tout autant que les tenants du système économique et financier seront capables de « surfragiliser Â» les conditions sociales des ouvriers et ouvrières, petits fonctionnaires et employés, de les aliéner par les procédés désobligeants de l’octroi des prêts hypothécaires à l’habitation, l’achat du véhicule et de la délivrance des cartes de crédit – bien sûr, en y ajoutant de surcroît, comme le comble de l’aliénation, les fameuses réalisations des émissions de téléréalité, les organisations des compétions sportives locales et internationales, les festivals de cinéma et de musique, les défilés carnavalesques – ils garderont la ferme conviction que les vents de la « Révolution Â» ne traverseront pas de sitôt le désert des frustrations massives. 

Nous le croyons bien et voulons poser la question comme Nietzsche(7) : Â« L’homme est quelque chose qui se doit dépasser : qu’as-tu fait pour cela? Â» 

L’existence quotidienne est devenue un boulet de canon attaché aux pieds du « pauvre Â». Maintenu dans un état d’ Â« expectativisme naïf Â», celui-ci nage péniblement dans l’océan de sa misère. Cependant, il sait que, à bout de force, il va se noyer au bout du compte dans l’indifférence de ses bourreaux…Et d’autres zombis, à tour de rôle, viendront occuper sa place pour que le train de la mondialisation continue à se déplacer sans ambages sur les rails de l’exploitation cruelle de l’être humain. Les cimetières du monde sont remplis de fosses en terre battue des travailleuses et des travailleurs d’usine, des mineurs décédés du cancer de poumon et de la tuberculose, des institutrices et des instituteurs mal payés emportés par la faim et le froid. Ils ont agonisé, sans médicament, dans leur vieille chaumière. Ou dans un hôpital insalubre, sous-équipé pour indigents. Pourtant, ils ont voté un « président Â» ou se sont assujettis au « roi Â» ou à la « reine Â». 

Il n’y a aucun salut pour les « pauvres Â» en dehors d’une lutte organisée, dictée et soutenue par la volonté réelle, la détermination inébranlable d’aboutir à une forme quelconque de « Révolution Â» politique, économique, sociale et culturelle dans le monde.  

Robert Lodimus
Photo credit: Moun
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Références

1.- Shoah, l’extermination des Juifs par l’Allemagne d’Hitler.

2.- Léon Pinsker, Auto-émancipation, 1882.

3.- Jean-Claude Passeron et Claude Grignon, Le Savant et le Populaire. Misérabilisme et populisme en sociologie et en littérature, Éditions Seuil, 1989.

4.- Albert Jacquard, Mon Utopie, Éditions Stock, 2006.

5.- Personnage biblique.

6.- Avec Le Prince de Machiavel, la politique est devenue la « science du pouvoir Â».

7.- Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, Éditions Gallimard.