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L’arrogance sans pareille de Charles Castel Gouverneur de la BRH!

charles castel brhCharles Castel gouverneur de la BRH

Par Yves LAFORTUNE --- Depuis plus d’un mois, la gourde ne cesse de subir les bousculades du dollar se raréfiant et qui a déjà atteint près de soixante gourdes pour un dollar américain. Plus d’un s’interrogent sur le sort de la gourde face au dollar. Ils sont nombreux… Eux, Vous et moi à intégrer de plus en plus, de mieux en mieux et faute de mieux cette peur de l’incertain ! Monsieur Charles CASTEL, Gouverneur de la Banque de la République d’Haïti (BRH) s’est quand même fait attendre avant d’expliquer les stratégies de la BRH pour endiguer la dévaluation de la gourde face au dollar. L’ayant fait, c’est plutôt au calme qu’il a convié la population par delà les répercussions de la crise socio-économique et politique, la flambée du dollar, la hausse généralisée des prix que les théories économiques standard s’avèrent incapables d’expliquer.

S’attendait-on vraiment à une exposition de la force de la BRH ou de préférence à des choix économiques freinant cette hémorragie conduisant la population haïtienne à l’évanouissement ?

Face à la résignation qui tend à faire de l’acteur individuel un prisonnier du contexte, d’aucuns voient la nécessité de brandir l’indignation. L’indignation, si elle n’est pas suivie d’effets ne suffit pas[1] mais à cette phase de la dérive, il est impératif de s’indigner. C’est la première manifestation de sa dignité, de ses aspirations, de ses sentis, ses ressentis et de son envie de vivre dans un monde meilleur.

Il ne s’agit nullement dans ce papier de contredire les propos du baron de la BRH exhibant les « muscles Â» de son institution. Il s’agit de s’interroger sur l’existence d’ « approche centrée sur la population Â» dans les plans des décideurs. La question est de savoir aujourd’hui si les muscles de la BRH sont assez fermes et puissantes pour éviter la faim, la flambée du prix des produits de premières nécessités quand on sait que le budget rectificatif d’Avril 2015 est parti d’une hypothèse de quarante cinq gourdes pour un dollar?

N’est-elle pas irresponsable et même « malveillante Â» de montrer la force d’une institution quand plus de 8 millions d’habitants vivent dans l’extrême pauvreté ? Quelle est la meilleure qualification des propos de Charles Castel quand la seule annonce de la montée du dollar face à la gourde ne fait que renforcer l’extrême pauvreté qui ne peut plus durer.

N’est-il pas irresponsable de présenter les atouts de la BRH face à la crise quand il faut prendre des mesures concrètes pour soulager la population haïtienne qui paie le prix fort quand la gourde se déprécie. La souffrance des couches malaisées se vit au quotidien car pour vivre, il faut acheter et ils savent déjà que les prix vont augmenter pour tout et la seule justification des commerçants sera liée au dollar qui augmente en valeur. Cette idée des représentations sociales guidant les actions et les pratiques se confirme dans les stratégies commerciales haïtiennes du simple acteur individuel du commerce informel ambulant au grand commerçant bien installé. La réalité dépasse le simple jeu des représentations sociales et l’on est en droit de se demander si les décideurs comprennent le sort des couches défavorisées et piétinées. Charles CASTEL fait partie de ces dirigeants qui prétendent agir au mieux-être de ceux dont ils ignorent totalement les conditions de vie au quotidien.

Cette note est une indignation citoyenne par rapport à l’arrogance du Gouverneur qui en Avril dernier s’en prenait à un journaliste d’avoir fait une approche connotative d’une parodie de Dany Laferrière autour de la situation d’Haïti. Aujourd’hui encore, le ton n’a pas changé, le gouverneur dans toute sa sérénité dit que la BRH se porte bien même quand le pays va si mal.

L’arrivée M. Castel comme Gouverneur de la BRH amène le délicat bilan de la gourde qui est passée de 39 gourdes environ à environ 60 gourdes. L’observateur averti devrait voir dans les propos du Gouverneur le sentiment de satisfaction d’une mission bien réussie de la part de quelqu’un qui s’y connait en termes de satisfaction du client. M. Castel affirme qu’il y a des dollars et que la BRH est attentive. Mais cette attention se porte sur quoi au juste ? Pourquoi la BRH n’agit pas aujourd’hui pour des lendemains qui chantent ? Il est clair que l’attention de la BRH n’existe pas du tout ou du moins ne se porte pas sur les problèmes fondamentaux du peuple haïtien en proie à toutes les difficultés liées avec la dépréciation de la gourde face au dollar. Les propos de M. Charles Castel sont manifestes de son mépris du dénuement de la grosse majorité de la population haïtienne quand il demande de ne pas vivre au-dessus de leurs moyens. Plus de 71% de la population d’Haïti vivent au-dessous du seuil de pauvreté avec moins de USD 2/jour tandis que plus de 50% sont touchés par le chômage ou le sous-emploi selon les dernières estimations de l’OCDE[2]. Comment peut-on vivre au-dessus de ses moyens quand on est dans le dénuement total ?

Il paraîtrait que La mission du Gouverneur est accomplie car il a réussi à pousser plus loin les bouchons de l’extrême pauvreté d’une population dont plus de 47.5% sont concernés par l’analphabétisme. Ce cri d’indignation est le cri de tous ceux qui croient que les dirigeants sont là pour garantir de bonnes conditions de vie et non qui génèrent l’extrême misère par des choix stratégiques empreints d’irresponsabilité, de nonchalance, de mépris, de mauvaise foi et de malhonnêteté face à une population sans défense et qui rêve de muscle en ayant lui même que des os !

 lafortune yves150Yves LAFORTUNE
MAP, Evaluateur de Programmes Publics
Avocat, Designer Organisationnel
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[1] Joseph Confavreux, « Après l’indignation », Vacarme 2011/2 (No 55), pp.20-24

[2] Organisation de Coopération et de Développement Économique.