Analyses & Opinions
Requiem pour la société coloniale sans sanction
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- Catégorie : Opinions
- Publié le samedi 26 novembre 2016 17:31
Par Alin Louis Hall --- Avec les élections de 1957, Haïti a pris un mauvais tournant. Pour preuve, aucun membre du secteur privé haïtien n’a le profil entrepreneurial de l’agro-industriel Louis Déjoie qui implanta 18 usines à travers le pays ou d’un Thomas Désulmé. En 2016, soit près de 60 ans plus tard, l’économie haïtienne formelle n’a pas encore dépassé la barre des 150,000 emplois pour plus 6 millions d’Haïtiens en âge de travailler. Le secteur privé haïtien devrait penser à baisser le ton de sa voix. Certains de ses membres sont trop bavards et trop bruyants pour moins de 3% qui définitivement représentent une donnée statistique qu’aucun sondage ne pourra « brider ».
En Haïti les gens intelligents sont pleins de doutes, alors que les imbéciles sont bourrés de certitudes. Les élections viennent de confirmer l’analphabétisme et la misère comme leviers du statu quo. Comme le fameux contrat McDonald prévoyait des dépossessions massives de terre pour les plantations de figue banane, il fut aisé à Cincinnatus Leconte d’armer les Cacos contre le gouvernement Antoine Simon. Une fois installé, Leconte annula purement et simplement ce contrat obtenu au moyen de la fraude et de la prévarication.
Ce troisième tour de cette énième élection est en train de prouver que la société coloniale sans sanction s’exerce beaucoup, comme le diable dans un bénitier, à vouloir se maintenir … Ainsi donc, une fois de trop, nous sommes en train de dire adieu à la société sans peur ni danger. En clair, religieusement, aucune contrition mais plutôt une profession de foi en attendant la multiplication des « bananes ». Pour mieux appréhender la dimension endémique de l’impunité, il faut s'en remettre à la pédagogie coloniale de l’arbitraire : "Oken rat pap bouché trou koté sourit sot pasé. Li ka besoin'l yon jou". A ceux qui s'en ont pris au commissaire sans dents ni ton, je rappellerais que les gouvernements d’Aristide et de Préval n'ont intenté aucun procès sérieux contre les sbires du régime des Duvalier. Le rapport Paul Denis a été classé sans suite. Ainsi s’explique comment, sans ambages, les imbéciles heureux et les thuriféraires de la subalternité ont voté le dépositaire du néo-colbertisme indexé dans un rapport de l’UCREF. En Haïti, les dauphins des anciens présidents haïtiens se disputent les présidentielles alors que les indicateurs macroéconomiques des trente dernières années racontent une toute autre histoire. Ce cercle des élections ouvert depuis plus d’un an qui ouvrent un autre chapitre de cette « transition qui n'en finit pas » confirme que l’histoire d'Haïti n’est qu’une suite de bégaiements, d’éternuements et de hoquets. Qu’il soit rappelé que Dick Cheney a eu le minimum de décorum de ne pas se présenter comme candidat de Georges W Bush. Joseph Biden a eu la même décence pour d'autres raisons.
Le plumage vaut le ramage
La loi sur la transformation du service métropolitain de collecte de résidus solides (SMCRS) en Service national de gestion des résidus solides (SNGRS) a été votée à la chambre des Députés. Adoptée à la quasi-unanimité des députés présents à la séance du mercredi 7 septembre 2016, cette loi devra permettre une fois votée au sénat de lutter efficacement contre l’insalubrité dans le pays. Sans surprise, les Députés ont opté pour l’instinct de conservation et le déni. Dans les deux cas, il ya vraiment de quoi avoir froid au dos et d'avoir froid dans le dos ! A la vérité, en observant le profil du parlementaire haïtien on a le droit d’être très inquiet. En effet, lorsque le politicien haïtien ne s’investit pas dans l’hôtellerie, il est propriétaire d’une station de radio « vonvon ». Selon qu’il soit musicien ou propriétaire de taxi-motos, aucune activité liée la production nationale ne fait pas partie de son univers.
Mais le profil qui devrait vraiment inquiéter est celui de l’homme d’affaires haïtien. Il est disposé à payer US $1,500 pour assister à un débat alors qu’il ne dispose même pas d’une bibliothèque. Demandez à cette assistance qui était au Karibe lors du débat « yon sel gren banann » les noms des trois derniers livres lus, ils seront dans leur petit soulier. Dans la même veine, Haïti est sans nul doute le seul pays francophone avec moins de cinq (5) quotidiens. Or ce sont des gens sans lecture ni écriture qui organisent les débats. A les entendre vanter les qualités de leur candidat, ils donnent l’impression que le Wall Street Journal devrait se pencher sur ce cas très singulier. Avec une formule que les entrepreneurs comme Buffett, Trump, Slim, Gates Warren Buffet n'ont pas, Harvard School of Business devrait franchement inviter « Neg Banann lan » comme conférencier. Pour mieux cerner leur univers, il importe de s’arrêter un instant sur l’ambiance de leur rendez-vous dominical au Florvil de l’après-Duvalier immédiat. Une foule immense reprenait après le chanteur Sweet-Micky, en chœur, les refrains suivants : « cé chien ou yé cé pou’w japé houp houp houp…cé chat ou yé cé pou’w miaulé , miaw , miaw , miaw, …» Allégrement, comme dans une ambiance de jardin d’enfant, le chanteur passait en revue toute la faune. Pour le régal des « cerveaux lents » qui faisaient tous les cris des animaux. Vraiment à se demander comment l’Organisation Mondiale de la Santé ait pu se tromper sur la date d’arrivée du Zika en Haïti. Pour ainsi dire, la société haïtienne se doit de chercher à comprendre pourquoi nos élites ne supporteront jamais un Jean-Paul Coutard (Neg Bus la !) ou un Pierre Léger (Neg Vétiver a !).
D’une manière générale, c’est un sujet de vives inquiétudes quand les Haïtiens se retrouvent suspendus aux lèvres d’une presse parlée qui se veut « unique, originale et vraie. D'ailleurs, en observant la liste des panélistes des grands rendez-vous, on voit en clair qui sont les principaux sous-traitants des coalitions réactionnaires. Depuis la dernière cargaison de septembre 2015 expédiée en Europe, la presse haïtienne, toujours friande d'actualités sur Jean-Charles Moise, Maryse Narcisse, Jude Célestin et autres, maintient le « blackout » le plus épais sur les exportations de «Neg Bannan la». Quand aux états financiers, aucun journaliste haïtien ou chroniqueur économique n'a pris son courage à deux mains pour placer l'enquête de l'UCREF au cœur de la campagne électorale. Déjà , j'avais fait remarquer que la participation des certains candidats aux élections présidentielles, législatives et municipales était la consécration de la Société coloniale sans sanction. Une référence non voilée aux deux faces de la même médaille du statu quo.
En fait, la qualité du matériel humain haïtien donc est un problème urgent auquel il ne semble y avoir aucune solution. En effet, lorsque ce sont les intellectuels qui n’arrivent pas à discerner le fondamental de l’accessoire, on est en plein droit d’affirmer que, même dans le meilleur des cas, Haiti est foutue. Tout comme l’homme d’affaires haïtien importe tout, la grande majorité de notre élite intellectuelle importe également sa pensée. A entendre les protagonistes lors du débat sur le Festival MassiMadi, on a l’impression que le monde allait s’arrêter de tourner. A ceux que la question intéresse encore, je rappellerais qu’il existe des « reines » de « bandes rara ou sanpwel » du sexe masculin. Soulignons qu’une société qui n'accepte pas le mariage homosexuel n'est pas nécessairement homophobe. En clair, c'était l'essence de la réponse du président sénégalais à Barack Obama. Un vrai choc des cultures sur l'homosexualité à Dakar le 27 juin 2013. Selon Philippe Bernard du journal Le Monde, Macky Sall ne s'est pas démonté en faisant cette déclaration suivante : « Le Sénégal est un pays tolérant qui ne fait pas de discrimination en termes de traitement sur les droits (…). Mais on n'est pas prêts à dépénaliser l'homosexualité. C'est l'option du Sénégal pour le moment. Cela ne veut pas dire que nous sommes homophobes. Mais il faut que la société absorbe, prenne le temps de traiter ces questions sans qu'il y ait pression. » (1) A cela, on pourrait ajouter l’attention sur le danger du monopole de la vérité détenu par l'Occident. Qu’il soit rappelé que, n'était-ce la mobilisation de la diaspora, le monde entier aurait cru jusqu'à maintenant que les Haïtiens seraient responsables de la propagation du virus du Sida.
Toutefois, la circonspection recommande de signaler que des études et recherches en psychologie ont établi que les homophobes en grande majorité sont des homosexuels refoulés. A la vérité, l’existence de reines du sexe masculin dans les bandes « rara » lève le voile sur des éléments de solution en milieu rural et prouve d’une certaine façon que l'Occident est toujours trop pressé à donner des leçons a des sociétés qui n’en ont pas besoin. La toile de fond de leur posture sur cette question laisse entrevoir une forme de supériorité de leur civilisation par rapport au reste du monde. L'homosexualité se pratiquait déjà en Afrique pour des raisons diverses, sous des formes variées. Ce sont les religions abrahamiques qui, depuis toujours, ont cherché à imposer leur vision du monde et de la Société. Avec la signature du concordat en 1860, c’est le retour en force des lunettes de Moreau de St-Méry pour rétablir la noblesse de l’épiderme comme planche de salut. Une carte en blanc qu’on a accordé aux Frères de l’Instruction Coloniale (FIC) pour formater le cerveau du petit haïtien lettré. C’est avec cet état d’esprit qu’on doit comprendre que lorsque nos politiciens n’attendent pas de l’instruction des ambassades étrangères, ils recyclent des expressions du genre « vivre ensemble » tirées de la bouche de l’extrême droite française. En sous-traitant le curriculum de l’instruction aux congréganistes, Haïti a ainsi créé sa propre structure de défense de l’eurocentrisme qui, comme une vieille garde réactionnaire, est capable de se rassembler en un temps éclair pour protéger la subalternité dans un pays où la notion du délai n’existe pas. D’ailleurs, on les a vu à l’œuvre en 2004 lors du dossier de la « restitution ». Le cordon sanitaire de Thomas Jefferson de 1806 a été reconduit ainsi autour de l’insolence nègre avec le concours de ses propres fils. Bien formaté avec le logiciel de la pédagogie coloniale, ils se sont servis de la forme comme l’heureux prétexte pour combattre le fond. Il s’agit ici de comprendre que nous avons été bien formés pour répéter « apré bon dieu sé blan ». Ainsi s’explique pourquoi l’Haïtien devient si violent quand on l’invite à se regarder dans un miroir pour accepter qu’il soit l’égal du blanc. Une réalité à laquelle notre système éducatif ne nous a jamais préparés. Un changement de paradigme qui nous donne peur et torpeur au point où l’Haïtien ne trouve pas mieux que de se faire photographier à Paris sous l’Arc de Triomphe où est gravé le nom de Rochambeau, le bourreau qui faisait dévorer les marrons par des dogues et qui faisait noyer les mulâtres. Avec ces élites qui sont en fait des satellites de l’Eurocentrisme, l’Occident continuera à détenir le monopole de la pensée unique, sa vraie arme de destruction massive.
Un cas régional singulier
Les récentes intempéries ont d’une manière assez claire démontré que l’accès aux départements des Nippes, de la Grande-Anse, du Sud, du Sud-Est et de la région des Palmes est contrôlé par la route de Carrefour. Indépendamment de la distance, des villes comme Léogane, Petit-Goave, Grand-Goave, Jacmel, Miragoane, Aquin, Anse-a-Veau, Jérémie, Coteaux, Aquin, Cavaillon ,Saint-Louis du Sud, Camp-Perrin Tiburon, Pestel , Port-Salut Anse d’Hainault et Les Cayes sont en fait des quartiers de la république du « faire semblant ». Pourtant, depuis le départ des Duvalier, les politiciens de cette région ne font que manger à tous les râteliers. Rien ne peut leur faire perdre le sourire. Pas même le bateau vénézuélien qui a contourné la péninsule sous leur nez en passant devant Les Cayes et Jérémie en direction de Port-au-Prince. Encore moins le convoi dominicain parti de Santo Domingo. Or, même quand les grandes villes caribéennes de l'Ile soient Santo-Domingo, Les Cayes et Jacmel et qu’elles partagent le même littoral, ils sont totalement indifférents que le convoi soit passé par Port-au-Prince. Clairement, la région souffre d'un déficit énorme de leadership. Les péninsulaires se doivent de détourner tous les cours d’eaux et rivières pour nettoyer la région de cette pacotille qui, comme les vautours, ne mange que de la charogne. Les équipements urbains infrastructurels portuaires et aéroportuaires ne figurent pas sur la liste de leurs priorités. Sans nul doute, les bizarreries de l'après Mathieu constituent des expériences cliniques mettant notre déchéance à nu. Pendant que la péninsule agonise, les parlementaires n’ont pas trouvé mieux que de s’opposer à l'aide dominicaine. Pourtant, à la première occasion, ils s'y sont jetés comme les charognards s'affalent sur des cadavres en putréfaction. Dans l'intervalle, on s'accuse mutuellement. De vrais cerveaux lents et de bons chiens couchants qui gardent un silence complice sur les 150 millions de gourdes escroquées des TPTC pour les travaux d’agrandissement de l’aéroport Antoine Simon. Vraiment de quoi avoir la nausée ! Surtout que dans le rang des victimes se retrouvent des commerçants cayens dont on a abusé la confiance dans cette affaire.
En effet, selon le journaliste Ricardo Lambert, « l’artisan principal de ce crime financier, Philippe ou ingénieur Pipo – ainsi connu- qui, selon les présumés malfaiteurs, a été le principal fournisseur de chèques détournés, et souvent approvisionnés d’un montant plafond de six millions de gourdes, est activement recherché par l’institution policière pour répondre de ces actes qui lui sont reprochés, selon le porte-parole. Dans la liste des personnes recherchées dans ce dossier, figurent aussi les noms de Pierre Antoine Junior, Jean Baptiste Carl, Edwige, Nobert Félix, Alcin Daniel, Jasmin Nérestant, Emmanuel Baptiste, Clervil Jean Alix et Jean Baptiste Franck. » (2) A la vérité, ces individus sont les boucs émissaires d’une vaste opération qui aurait servi à financer la campagne électorale d’un parti politique dans le Sud. Au niveau de la DCPJ, l’enquête se poursuit. Dans « le syndrome du cerveau lent », j’avais attiré l’attention sur leur credo : « Pour le statu quo, bêchons joyeux ; pour les coteries, mourir est beau ; dans la déresponsabilisation, point de traitres ; pour le pays, formons des cerveaux lents ; de l’incohérence soyons seuls maitres. » (3)
A propos de l’incohérence, pour mieux étayer ma thèse, leur comportement et leur posture ou attitude, le long de leur parcours politique, constituent des matériaux bruts pour faire avancer les recherches en psychanalyse afin de mieux comprendre la fourberie et la roublardise du politicien haïtien. Une vraie ligne brisée comme trajectoire. Qu’on se le rappelle des démêlés du député Gabriel Fortuné avec Sweet Micky, le dépositaire de la trivialité. Le chanteur grivois ignora royalement les menaces du parlementaire qui avait pourtant publiquement interdit au chanteur de proférer des obscénités - l’essence même de l’artiste - lors d’une prestation à l’ occasion de la fête patronale des Cayes. Néanmoins, en décembre 2010 sur une station de radio de la capitale, qu’on se rappelle qui avait annoncé les couleurs: « il ne reste plus une machette dans les étagères des magasins de la ville des Cayes ». Vous connaissez la suite! A-t-on déjà oublié un passé si récent? A se demander comment peut-on être aussi amnésique en Haïti? Sans surprise, en 2011, comme le magicien tire le lapin du chapeau, l’ancien parlementaire devient le Délégué départemental du Sud représentant direct de la « soulouquerie rose ». Quelques mois après, voyant venir le naufrage, le tacticien exploite un conflit ouvert avec Evinx Daniel, une des nombreuses bizarreries du délire « tetkalien », pour prendre ses distances avec la grande vadrouille. Si le bouillant politicien est en mode repositionnement permanent, c’est parce que, de la conviction, il n’a jamais été question. La raison du «devan devan net» est toujours la meilleure. Son credo ! C’est avec les gagnants et surtout ceux qui ont de l’argent sale qu’il faut s’allier. Il sait bien, comme nous l’avons démontré, que la ville des Cayes a porté le bolivarisme sur les fonts baptismaux. Pourtant, il se prononce en faveur de la déréliction rose ayant traité sa région en peau de chagrin dans la ventilation des fonds PetroCaribe.
Les Péninsulaires sont dans de beaux draps avec le maire de la capitale mondiale du vétiver qui préfère s’investir à fond dans la campagne du dépositaire du néo-colbertisme de la monoculture. Dans le Sud, il est le visage officiel de la banane ! Par conséquent hypothéquant sérieusement l’avenir immédiat de la ville des Cayes au cas où « Neg Bannan lan » ne remplacerait pas Jocelerme Privert. Tout de même que c’est triste que de constater que certains péninsulaires ne se sont pas encore rendu l’évidence qu’ils se sont faits avoir par une bande de crétins, de médiocres et de cancres. Comment expliquer cette génuflexion devant la pétarade rose ? « Ayiti ap dékolé, Okay pren devan ». De l'enfumage! L’objectif inavoué de ma conférence en avril 2012 à l'Alliance Française des Cayes était justement de mettre en exergue le patrimoine immatériel de la péninsule du sud et de la ville des Cayes en particulier. Pour ne pas tomber dans le piège de la stratégie de la distraction des masses. En ce sens, le carnaval des Cayes en 2012 fut un vrai cheval de Troie. Pour dire les choses autrement, comme pour le culturel, le tourisme ne saurait être abordé que transversalement. Il touche tout autant à l’aménagement du territoire, à l’ingénierie territoriale, au développement économique, à la formation, à l’emploi, à l’environnement, à la santé, à la culture, aux sports, aux loisirs. C’est donc un sujet transversal où il faudra savoir faire usage de multi-compétences et où les profils d’experts rencontrés seront en double voire en triple compétences. Large et transversal, le champ d’expertise couvrant le tourisme touche directement les progrès économiques, sociaux et environnementaux. Le tourisme, s’il est un secteur d’activités économiques, n’est pas pour autant un domaine doctoral. La « tourismologie » n’existe pas. La « carnavalogie », encore moins.
Comme je l’avais prédit, la ville des Cayes n'a rien bénéficié des fonds Petro Caribe. Une ville sans port ni aéroport. Sans électricité ni drainage. Ce déficit de leadership se manifeste également dans la réception glaciale réservée à la barge de la solidarité portoricaine. Le silence du maire de la ville des Cayes, généralement bavard et baveux comme un pot à moutarde, sur les pressions exercées par la « république du faire semblant » pour faire débarquer l’aide à Port-au-Prince est suffisamment éloquent. Dans ce combat pour la décentralisation, les péninsulaires se sont appuyés sur le drame Mathieu comme l’heureux prétexte pour passer un test important. La précieuse cargaison a débarqué dans le port des Cayes. Néanmoins, si le maire n’était pas en conflit ouvert avec les promoteurs du Port International Saint-Louis, le monde entier serait déjà au courant de son existence. Ce port n’attend que l’autorisation de l’Autorité Portuaire Nationale. En quoi cela dérange pour paraphraser Jocelerme Privert, un homme du Sud ? « Pozé Bon question », pour parler comme l’homme de Port-Salut. En fait, doit-on tenir rigueur à un président provisoire sur un dossier ignoré par deux de ses prédécesseurs, des hommes du sud, en l’occurrence le président constitutionnel, Jean-Bertrand Aristide, de Port-Salut, et le président de facto de la communauté internationale, Joseph Michel Martelly, des Côtes-de-Fer. Mais, revenons au conflit ouvert entre le maire et l’agro-industriel Pierre Léger « Neg vétiver a ». L’arbre qui cache la forêt ! Un autre groupe serait intéressé dans la construction d’un port à Faucault, à l’est de l’embouchure de la rivière l’Islet. En politique, la coterie est au parti ce que la secte est à la religion. Elle sacrifie le bien public, la vérité et la justice. En Haïti, rien n’échappe aux coteries, pas même la philanthropie comme on le verra plus tard, vouées à maintenir aux dépens du bon sens et du goût, des préjugés pouvant être aussi sincères que contraires à la raison. Dans leur bacchanale de la déraison, les coteries croient défendre la cause du juste, du vrai et du beau et ont recours aux cabales lorsqu’il s’agit de conspirer pour le succès de leurs opinions et de leurs intérêts.
Dans l’intervalle, on encourage chefferies, confréries et toutes sortes de conneries. De quelle autorité un maire ou un délégué peut prétendre à une exclusivité de distribution d'aide sans aucunes provisions légales l'y autorisant ? Aucune loi ne donnerait à un maire ou encore moins à un délégué des pouvoirs que même un président constitutionnel n'a pas. Il s’agit ici de combattre toute forme de résurgence de l’environnement ante 1986 surtout quand il n'y a pas eu d'état d'urgence déclarée mettant en veilleuse la Constitution. La formulation d’une note de presse de la mairie des Cayes affiche un penchant raffiné pour l’absurde manichéen. Il faut voir dans cette note une volonté manifeste d’ empêcher des individus bien intentionnés de venir en aide aux victimes de l’ouragan Mathieu comme dans le cas du Dr Pierre Paultre Desrosiers, médecin spécialiste en santé publique et anthropologue, ayant occupé la fonction de directeur régional qui réunissait les départements du Sud et de la Grande-Anse; puisque à l’époque le département des Nippes était inclut dans la Grand Anse, qui a voulu mettre une vaste expérience, avec plus de 25 ans dans vingt-sept pays africains et sa spécialisation en Maladies infectieuses et Tropicales et surtout en Médecine de Catastrophe - urgences collectives, au profit de sa ville natale. Ce n’est vraiment pas comprendre l’ampleur ni la mobilisation que les dégâts de l’ouragan Mathieu exigent lorsque la municipalité entretient ou s’investit dans des partenariats qui entravent les bonnes intentions au lieu de mobiliser et d’utiliser toutes les organisations de Cayens expatriés. Très clairement, l’édile de la ville des Cayes préfère rejeter l’universalité du « bon samaritain ».
Comparé à la note salée de 2 milliards de dollars américains de Mathieu, le montant des fonds collectés par chaque organisation ou fondation de la diaspora devrait les ramener sur terre. En statistique, même pas une marge d’erreur lorsqu’on rapporte leurs recettes sur le montant des dégâts. Dans « le syndrome du chien couchant », j’avais attiré l’attention sur ce moule colonial à fabriquer des individus égocentriques qui croient que le monde tourne autour d’eux. La population ne sait à quel saint se vouer avec ces saltimbanques, enthousiasmés et exaspérés, prêts à tout pour combler leur vide existentiel. Ces corsaires de la politique, flibustiers de la morale, de l'Imaginaire et de la désespérance et ces contrebandiers de la solidarité sont motivés par leur revanche sur la société coloniale sans sanction, leur modèle et cadre de référence. Dans cette confrontation avec eux-mêmes, ces pseudo-philanthropes sont en réalité les vrais bénéficiaires de leur propre mécanisme compensatoire d’autant plus que le consensus entre la diaspora, la communauté internationale et les politiciens haïtiens pourrait se résumer en quelques phrases. Cela fait des lustres que tous les violons se sont accordés pour ne pas laisser mourir tous les Haïtiens d’un trait. Pourvu qu’ils crèvent l’un après l’autre. Jusqu’à leur extinction certaine et totale. Mais sur les problèmes structurels pour sortir du non- développement durable, aucun signataire. Un choix clairement assumé pour le génocide.
Conclusion
Aussi longtemps que le déni et le mépris seront les deux axes de notre société, Haïti sera une rumeur. Une fuite en avant! Le peuple souverain d’Haïti qui a milité et manifesté démocratiquement pour l’affirmation de choix essentiels ne peut plus continuer à assumer les conséquences d’une désespérance programmée et entretenue. Haïti est encore une fois face à son destin. Seule. A l’heure où notre vision économique s’accommode lâchement du pire, comment articuler une réflexion cohérente et mobiliser des énergies disponibles pour sortir du non-développement durable. La présente réflexion procède du seul désir, bien légitime, de comprendre l’urgence d’un nouveau contrat social, d’un nouveau modèle économique, d’une révolution éthique pour l’instauration de l’ordre républicain. De la seule nécessité, impérieuse, d’éclairer le futur. Du seul projet, vital, de dégager avec clarté les perspectives et opportunités qui s’offrent à nous pour un avenir partagé.
Références:
(1) Philippe Bernard, «A Dakar, choc des cultures entre Barack Obama et Macky Sall sur l'homosexualité », publié le 27 juin 2013 à 19h32, mis à jour le 28 juin 2013 à 11h30 et consulté le 18 novembre 2016 sur http://www.lemonde.fr/afrique/article/2013/06/27/a-dakar-choc-des-cultures-entre-barack-obama-et-macky-sall-sur-l-homosexualite_3438210_3212.html#XjXyr2by6siWfWMB.99
(2) Ricardo Lambert, « Les TPTC escroqués de 150 millions », publié le 22 octobre 2015, consulté le 19 novembre 2016 sur http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/151504/Les-TPTC-escroques-de-150-millions
(3) Alin Louis Hall, « Le Syndrome du cerveau lent », publié le 21 mars 2016 sur http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/156864/Le-syndrome-du-cerveau-lent-1-de-2
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