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Lyonel Trouillot à Sainnécharles Claude: Je ne tiens aucunement à engager une polémique avec vous

lyonel-trouillot-2Monsieur Sainnécharles, j'ai reçu deux fois votre envoi des références de deux articles consacrés à Frankétienne, articles que j'avais lus et qui font débat. S'exprime là, et sur le site parole en archipel, deux choses majeures: une réflexion sur la littérature et une pratique d'écriture. Que l'on soit d'accord ou pas avec les outils d'interprétation utilisés, comme avec les conclusions et les propositions. Le champ littéraire ne peut être, par ce besoin de vitalité propre à sa nature et nécessaire à son développement, qu'espace de contradiction.

Une chose cependant me trouble profondément, n'ayant rien à voir avec les articles eux-mêmes: votre acharnement à relayer, et mal :je vous signale le machisme (érection) / le flou (jeunes) est-ce une catégorie littéraire, sociale? la redondance (sacrées, quatre points d'exclamation), comme si les articles ne (se) suffisaient pas et qu'il fallait que vous (de quel lieu?) en renforciez la valeur par une caution de groopie. Au fait, votre petite phrase a tout l'air d'une stratégie de positionnement qui vous ferait passer comme co-auteur de ces articles, en tant que "jeune". Je remarque aussi que dans votre introduction le propos des articles n'est pas mentioné, on suppose que ce n'est pas le débat qu'ils suscitent, avec une belle part d'intelligence, qui vous intéresse, mais le côté "bandant" d'une "classe d'âge". Or, en littérature, il n'y a de nous que du lieu des pratiques communes.

La nécessité des débats, voire des engueulades, ne fait pas de doute. On peut librement utiliser la théorie et pourquoi pas l'outrance comme outil argumentatif, mais le débat ne peut se tenir que du lieu des écritures critiques ou créatrices. parole en archipel comme d'autres lieux participe à ce débat. Hélas, ce débat est détourné ou parasité par des relayeurs cherchant à se faire une place dans le champ littéraire, inversement proportionnelle à leur production (tel oiseau querelleur que son obsession guerrière condamne à la solitude, tel écrivain inconnu en son pays qui parainne du lieu d'une condescendance non sans lien avec la tradition néo-coloniale et le syndrome du découvreur des "jeunes" (on pourrait dire "en érection" pour reprendre vos termes...). Cela me dérange fortement. La vieille question althussérienne (de quel lieu parle-t-on?) garde pour moi tout son sens. Je ne tiens aucunement à engager une polémique avec vous. Ce message n'a pour but que de vous exposer les raisons pour lesquelles je vous prierais simplement de ne plus m'envoyer vos courriers. Je lis par moi-même et me fais un devoir de suivre autant que possible les écritures littéraires haïtiennes et les débats qu'elles suscitent, en saluant la pluralité des discours et des pratiques, et l'éclosion de nouvelles voix.

Cordialement
Lyonel trouillot

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