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28 Juillet 2014: L'occupation Américaine 99 ans plus tard, Urgence et nécessité d’un travail de mémoire

carnaval des fleurs 2014  99 ans occupation americaine loramus touthaitiCourtoisie Loramus: Carnaval des fleurs 2014

Réflexion de la Société Haïtienne d'Histoire, de Géographie et de Géologie (SHHGG)

I

• Le centenaire du débarquement des soldats américains sur le sol national, le 28 juillet 1915, s'annonce dans un contexte particulièrement difficile pour la communauté haïtienne.

• Un moment d'extrême incertitude caractérisé par un profond malaise politique et socio-économique rendant de plus en plus préoccupantes les perspectives d'avenir.

• Cette situation d'incertitude est encore aggravée par la présence continue depuis 2004 de troupes étrangères dans le pays, limitant considérablement la souveraineté nationale.

• La remémoration du centenaire de la date souvenir du 28 juillet 1915 se présente pour la communauté haïtienne comme une occasion exceptionnelle de se livrer dans l'urgence à un sérieux travail de mémoire.

• Une manière d'effectuer un état des lieux de l'évolution de cette société, de soulever de nouveaux questionnements sur tout notre passé, y compris nos origines, puisqu'il est aujourd'hui admis que l'élargissement et l'approfondissement de ces questions contribuent grandement à mieux éclairer la compréhension des difficiles situations du présent.

• C'est donc, comme en 1923, voilà plus de 90 ans déjà, à un travail de ressaisissement national que la SHHGG convie les différentes institutions de la société civile.

• Une démarche invitant à une sorte de remembrement de nos valeurs ethnoculturelles, politiques et civiques.

• Se remémorer cette date renvoie à un nécessaire débat national afin d'interroger les raisons, causes, motifs et circonstances ayant conduit à cette brutale intrusion des forces américaines dans les affaires internes d'Haïti ainsi que de certains pays frères de la Caraïbe et de l'Amérique Centrale durant les premières années du XXe siècle.

• Aussi sommes-nous convaincus que cet impérieux travail de mémoire, pour s'accomplir pleinement, ne saurait se faire en dehors d'un esprit de solidarité : celui évoquant la situation de tous les peuples frères ayant subi, à la même époque dans l'ile ou ailleurs, des violations innommables de leur souveraineté.

• Ce travail de mémoire devra forcément s'accompagner d'un remarquable effort pour répondre davantage à la mission et à la vocation académique de la SHHGG. Un pressant besoin d'inventaire, d'évaluation et d'enrichissement de la production historiographique consacrée à cette période.

• Occasion aussi de promouvoir un indispensable débat pour interroger les certitudes des puissances tutrices d'hier et d'aujourd'hui et questionner surtout nos propres pratiques.

II

• 28 juillet 1915 - 28 juillet 2015, bientôt 100 ans. La conjoncture actuelle de ce prochain centenaire nous impose une réflexion collective et critique autour du « nous haïtien ». Qui sommes-nous ? D'où venons-nous ? Vers quoi tendons-nous ? Questions utiles, questions ramenant à d'autres interrogations afin de dévoiler les enjeux complexes de notre engrenage dans une économie-monde semblant échapper de plus en plus à ses propres lois.

• Cette remémoration implique la célébration des diverses expressions de multiples refus de cette occupation inscrite dans les mêmes démarches idéologiques et comportementales de supériorité « raciale » ou de civilisation ainsi que de néantisation de l'autre, telle qu'elles ont été initiées depuis les grands voyages à l'époque de Christophe Colomb.

• En référence à l'ensemble de ces attendus, la SHHGG, dans un élan national, pareil à celui ayant conduit à sa fondation le 8 décembre 1923, moins de dix ans après le débarquement des Marines américains sur le sol haïtien, invite les Institutions de la société civile habitées par ces mêmes préoccupations à l'accompagner et à conduire avec elle la préparation pour la remémoration de cette tragédie collective qu'a été l'Occupation américaine dont notre communauté porte encore les traces.

III

La SHHGG s'autorise, en tant qu'initiatrice de ce projet de remémoration, à soumettre à votre attention les recommandations suivantes :

1) Former à l'image des comités montés par nos devanciers qui ont connu, comme nous, mais avec des modalités différentes, la honte de la présence des troupes étrangères sur notre sol, d'un Comité national chargé de préparer ce centenaire ;

2) Donner à ce Comité le plus large écho possible afin d'interpeller les diverses opinions publiques du pays et de toutes les diasporas haïtiennes ;

3) Envisager progressivement le montage de sous-comités à travers tout le territoire national dans les Départements/Arrondissements, collectivités territoriales, localités du pays et dans les divers milieux de la diaspora haïtienne ;

4) Mettre en oeuvre une stratégie réaliste pour la conception et la matérialisation d'une série d'activités multiformes à l'échelle nationale afin d'honorer la mémoire des Haïtiens et Haïtiennes (connus (es) et méconnus (es)) qui se sont illustrés (es) dans ce combat pour libérer le sol haïtien des forces d'occupation ;

5) Organiser un grand colloque international structuré autour d'un argumentaire ample et clair pouvant permettre de questionner cette période ayant marqué un tournant dans les relations entre les Etats-Unis d'Amérique (EUA) et la Caraïbe ; entre les EUA/les Amériques ; entre Haïti et les peuples frères ; entre Haïti et les Haïtiens. Ce colloque devra aboutir aussi à des résolutions dans l'esprit de ce travail de mémoire.

Société Haïtienne d'Histoire, de Géographie et de Géologie (SHHGG)

juillet 2014